NOS MATINÉES ANGIBOURGÈRE
photo Laurent Chevalier
Nombreuses, elles se succèdent depuis juillet. On s'y retrouve seul, à deux, plus souvent à trois ou quatre ou davantage. Des matinées tirant parfois en longueur au vu d'un trop peu d'oiseaux, ou bien nous paraissant trop courtes quand il y en a trop à compter. Des matinées qui, pour chacun, représentent des parenthèses de tranquillité, de contemplation, d'aventure, d'apprentissage et de convivialité.
SEMBLABLES ET DIFFÉRENTES À LA FOIS
D'abord, ce qui ne change pas, comme cette table d'orientation croûlante dont la gravure s'estompe avec les années et les intempéries, donnant encore à lire les "216" mètres de sa modeste altitude. Immédiatement en contrebas, ce désordre de buissons et d'arbustes, un labyrinthe où circulent et avancent discrètement les voyageurs "rampants": pouillots, fauvettes, mésanges... Plus bas, à une soixantaine de mètres, de grands arbres dont des chênes mordant sur la ligne d'horizon, sans oublier ce vieux houx moribond et dépenaillé dont les branches nues servent de perchoirs éphémères et bien en vue à nombre d'oiseaux locaux et de passage: rougequeues, merles, fauvettes, pies-grièches, pics et même élanions. Enfin, vers l'arrière, s'étageant sur plusieurs dizaines de kilomètres, un somptueux panorama embrassant près d'un quart de département et se perdant là-bas au nord-ouest vers le Segréen, toute une campagne bocagère avec ses haies, ses fermes, ses villages et leurs clochers, le tout ponctué par le blanc des hangars agricoles, des usines et des éoliennes. Dans ce vaste paysage, des points de repère pour s'informer entre nous des oiseaux en mouvement et en approche: "les deux chênes", "les éoliennes de Chanzeaux", "l'usine", "le silo bleu", "le peuplier"... tout un lexique pour les habitués.
photo JM LogeaisEn dépit de ce cadre, toujours le même, nos matinées ne se ressemblent pas. Chacune décline un ciel singulier. Bleu pur et minéral où l'on perd de vue les oiseaux, Ciel paraphé de cirrus échevelés ou bien bosselé de petits cumulus. Ou encore ciel plombé de lourds et menaçants stratus. Aujourd'hui vent du sud promesse de chaleur, demain vent du nord âpre et réfrigérant, une autre fois rafales soufflant du sud-ouest contre lesquelles les migrateurs doivent se battre pour parvenir à avancer. À chaque matinée son ambiance, sa lumière, ses bruits environnants, son humeur du jour, ses participants. Et puis, bien sûr, il y a les oiseaux, locaux et migrateurs, leur nombre, la diversité des espèces, les bonnes surprises et les attentes comblées ou décues des observateurs, en bref tout un chapitre à écrire.
(La suite dans un prochain épisode)
Jean-Michel Logeais